Les animaux les plus comiques sont les plus sérieux ; ainsi les singes et les perroquets.

Charles Baudelaire, De l'essence du rire, Le Portefeuille, 1855.

samedi 28 mai 2011

Louise Michel par Laurent Tailhade

Louise Michel en costume de fédéré, 1871


Devant le Conseil de guerre, ses réponses vont au sublime, imposent l'admiration à ses adversaires les moins impartiaux. Involontairement, cela fait songer à la Pucelle confondant ses accusateurs. Mais la visonnaire de Domrémy, porte-parole des jongleurs franciscains, appuyait son courage sur l'absurde foi dans le surnaturel, tandis que Louise n'eut pour elle d'autre soutien que la raison, le droit, l'amour de la vérité. C'est pourquoi toutes variétés de cagots placent "la bonne Louise" si fort au-dessous de Jeanne d'Arc.

Au temps des représailles, les fusils partent seuls. Déjà Ferré, Bourgeois, Rossel, combien d'autres, avaient payé leur dette à la vengeance des repus. Quand vint le tour de son jugement, Louise, invitée à faire valoir ses moyens de défense, répondit :

"Ce que je réclame de vous, c'est le poteau de Satory où, déjà, sont tombés nos frères : il faut me retrancher de la société. On vous dit de le faire. Eh bien, on a raison. Puisqu'il semble que tout coeur qui bat pour la liberté n'a droit aujourd'hui qu'à un peu de plomb, j'en réclame ma part, moi!"


 Oeuvres posthumes / Louise Michel ; préface de Laurent Tailhade, Librairie Internationaliste, 1905


vendredi 13 mai 2011

Pas de lotus pour Madame Nhu

Pas de lotus pour Madame Nhu

Madame Nhu


Madame Nhu est morte le 24 avril 2011 dans cette résidence romaine qu’elle aimait, non loin de sa chapelle privée abritant une statue de la vierge Marie. Extravagante, catholique fervente, caustique, chic, féline et fragile, elle fut tout cela, et calomniée aussi, autant que Jiang Qing (et pour des raisons pas si dissemblables), une autre «Madame », mais du camp tout à fait opposé celle-là, puisqu'elle était Madame Mao.
Madame Nhu fut la première dame de la République du Sud-Viêt Nam de 1955 à 1963, mais une première dame spéciale à plus d'un titre. D'abord parce que le président Diem n'était pas son mari mais son beau-frère. Ensuite parce qu'elle ne transigeait pas beaucoup sur les choses de la religion. Des moines boudhistes s'immolent en signe de protestation? « Barbecue », répond-elle. A son cou, une rivière de diamants...en forme de crucifix. Et à sa solde, une milice paramilitaire composée exclusivement de femmes. Féministe aussi, à sa manière particulière. Qui ne manquait ni de classe, ni de hargne, ni d'élégance, quoi qu'on en dise et pense.
A lire :

Ngo Dinh Nhu

Nécrologie de Bruno Philip, Le Monde, 2 mai 2011


jeudi 5 mai 2011

La collection M@n des éditions Léo Scheer : salubrité d’une démarche démystificatrice

Il n’est pas certain que les intentions de l’alliance qui préside aux nouvelles destinées de la collection M@n des éditions Léo Scheer aient été appréciées à leur juste valeur. Prétendre les percer à jour, nous ne nous y risquerons pas ; en toute subjectivité, seulement présenter un point de vue.

Certains se sont probablement un peu vite gaussés de voir main dans la main celui connu pour avoir été le patron de TF1 (1988-2008) et l’un des plus célèbres éditeurs parisiens, dont on rappellera que le catalogue comporte entre autres les noms de Raymond Federman, Chloé Delaume, Pierre Guyotat, Alain Fleisher... De quoi imposer le respect et inciter à ne pas s’arrêter aux clichés et a priori négatifs. Inutile de tenter de tordre le cou aux préjugés, même si d’évidence, la caricature rance de l’actuel président du Stade Rennais cache un amateur d’art éclairé et un connaisseur pointu des grands irréguliers du langage que ce briochin d’origine (patrie de Louis Guilloux, de Villiers de l’Isle-Adam, de Jarry qui y fut lycéen) ne peut méconnaître. Inutile, en effet, car il suffit de voir ce qui se joue désormais dans cette collection M@n pour en comprendre l’enjeu réel.

Son intérêt n’est évidemment pas dans l’innovation que propose ce nouveau modèle de structure éditoriale, ni dans sa potentielle viabilité économique, mais dans le constat qu’elle pose, avec humour et sans concession, de la littérature aujourd’hui, de sa valeur, et du prix à payer de l’ambition, à savoir le sacrifice radical de tout sur-moi littéraire. Et cela, sans même que le contenu des oeuvres publiées entre en ligne de compte. Reproduisant ainsi le geste scandaleux d’un Marcel Duchamp qui fit d’un urinoir renversé l’œuvre d’art majeur que l’on sait, les deux comparses qui n’ont plus rien à prouver ni surtout de leçons de bon goût à recevoir, propulsent leur poulain derrière le stand dédicace d’un Leclerc de province où leur produit lentement s’écoule entre conserves et pâtés pour chiens.

Que la littérature tende à perdre son indépendance, ses qualités propres, sa gratuité, entraînée qu’elle est par une évolution qui n’épargne rien, acquérant pour une large part les caractères d’un produit industriel, fabriqué et consommé en série, avec obligation de rapporter des dividendes... Voilà qui n’est pas neuf, il est vrai. Mais il y a dans cette éclatante illustration par l’exemple, dans le cristal implacable de ces faits, la beauté, la fougue, l’alacrité du jeune Caligula intronisant son canasson sénateur.

Gageons que la génération montante saura apprécier à sa juste et vraie valeur la tonalité à la fois subversive et démystificatrice de ce message.



mercredi 4 mai 2011

Emma la rouge

Emma Goldman (1869-1940)

 « L’une des femmes les plus dangereuses d’Amérique ».

J. Edgar Hoover, futur chef du FBI, 1917

mardi 3 mai 2011

Cochons-sur-Marne


Chaque moderne porte en soi une petite Eglise infaillible dont il est le Christ et le Pontife et la grosse affaire est d’y attirer le plus grand nombre possible de paroissiens.

Belluaires et porchers

Un trait caractéristique du bourgeois est la peur de toute détermination héroïque chez les autres, aussi bien que chez lui-même.

Quatre ans de captivité à Cochon-sur-Marne